Hérodote, Histoire, II, 68-70
τῶν δὲ κροκοδείλων φύσις ἐστὶ τοιήδε. τοὺς χειμεριωτάτους μῆνας
τέσσερας ἐσθίει οὐδέν, ἐὸν δὲ τετράπουν χερσαῖον καὶ λιμναῖον ἐστί.
τίκτει μὲν γὰρ ᾠὰ ἐν γῇ καὶ ἐκλέπει, καὶ τὸ πολλὸν τῆς ἡμέρης διατρίβει
ἐν τῷ ξηρῷ, τὴν δὲ νύκτα πᾶσαν ἐν τῷ ποταμῷ. θερμότερον γὰρ δή ἐστι τὸ
ὕδωρ τῆς τε αἰθρίης καὶ τῆς δρόσου. (2) πάντων δὲ τῶν ἡμεῖς ἴδμεν
θνητῶν τοῦτο ἐξ ἐλαχίστου μέγιστον γίνεται? τὰ μὲν γὰρ ᾠὰ χηνέων οὐ
πολλῷ μέζονα τίκτει, καὶ ὁ νεοσσὸς κατὰ λόγον τοῦ ᾠοῦ γίνεται,
αὐξανόμενος δὲ γίνεται καὶ ἐς ἑπτακαίδεκα πήχεας καὶ μέζων ἔτι. (3)
ἔχει δὲ ὀφθαλμοὺς μὲν ὑός, ὀδόντας δὲ μεγάλους καὶ χαυλιόδοντας κατὰ
λόγον τοῦ σώματος. γλῶσσαν δὲ μοῦνον θηρίων οὐκ ἔφυσε, οὐδὲ κινέει τὴν
κάτω γνάθον, ἀλλὰ καὶ τοῦτο μοῦνον θηρίων τὴν ἄνω γνάθον προσάγει τῇ
κάτω. (4) ἔχει δὲ καὶ ὄνυχας καρτεροὺς καὶ δέρμα λεπιδωτὸν ἄρρηκτον ἐπὶ
τοῦ νώτου. τυφλὸν δὲ ἐν ὕδατι, ἐν δὲ τῇ αἰθρίῃ ὀξυδερκέστατον. ἅτε δὴ
ὦν ἐν ὕδατι δίαιταν ποιεύμενον, τὸ στόμα ἔνδοθεν φονέει πᾶν μεστὸν
βδελλέων. τὰ μὲν δὴ ἄλλα ὄρνεα καὶ θηρία φεύγει μιν, ὁ δὲ τροχίλος
εἰρηναῖόν οἱ ἐστὶ ἅτε ὠφελεομένῳ πρὸς αὐτοῦ. (5) ἐπεὰν γὰρ ἐς τὴν γῆν
ἐκβῇ ἐκ τοῦ ὕδατος ὁ κροκόδειλος καὶ ἔπειτα χάνῃ (ἔωθε γὰρ τοῦτο ὡς
ἐπίπαν ποιέειν πρὸς τὸν ζέφυρον), ἐνθαῦτα ὁ τροχίλος ἐσδύνων ἐς τὸ
στόμα αὐτοῦ καταπίνει τὰς βδέλλας? ὁ δὲ ὠφελεύμενος ἥδεται καὶ οὐδὲν
σίνεται τὸν τροχίλον.
Passons au crocodile et à ses qualités naturelles. Il ne mange
point pendant les quatre mois les plus rudes de l'hiver. Quoiqu'il ait
quatre pieds, il est néanmoins amphibie. Il pond ses oeufs sur terre,
et les y fait éclore. Il passe dans des lieux secs la plus grande
partie du jour, et la nuit entière dans le fleuve ; car l'eau en est
plus chaude que l'air et la rosée. De tous les animaux que nous
connaissons, il n'y en a point qui devienne si grand après avoir été si
petit. Ses oeufs ne sont guère plus gros que ceux des oies, et l'animal
qui en sort est proportionné à l'oeuf ; mais insensiblement il croît,
et parvient à dix-sept coudées, et même davantage. Il a les yeux de
cochon, les dents saillantes et d'une grandeur proportionnée à celle du
corps. C'est le seul animal qui n'ait point de langue ; il ne remue
point la mâchoire inférieure, et c'est le seul aussi qui approche la
mâchoire supérieure de l'inférieure. Il a les griffes très fortes, et
sa peau est tellement couverte d'écailles sur le dos, qu'elle est
impénétrable. Le crocodile ne voit point dans l'eau, mais à l'air il a
la vue très perçante. Comme il vit dans l'eau, il a le dedans de la
gueule plein de sangsues. Toutes les bêtes, tous les oiseaux le fuient
; il n'est en paix qu'avec le trochilus, à cause des services qu'il en
reçoit. Lorsque le crocodile se repose sur terre au sortir de l'eau, il
a coutume de se tourner presque toujours vers le côté d'où souffle le
zéphyr, et de tenir la gueule ouverte : le trochilus, entrant alors
dans sa gueule, y mange les sangsues ; et le crocodile prend tant de
plaisir à se sentir soulagé, qu'il ne lui fait point de mal.
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